Discours à la Place Léon-Blum, 8 mai 2023

Cérémonie du 8 mai 2023, Place Léon-Blum à Marseille

« Comme chaque année, nous voici rassemblés pour commémorer, en ce lundi 8 mai 2023, la victoire des Alliés contre le nazisme et la fin de la deuxième guerre mondiale en Europe.

Le 8 mai 1945, après 6 années de guerre et d’occupation, notre pays porte les stigmates de l’une des plus grandes tragédies du XXème siècle. 

Après tant de souffrances et de luttes, libérée de ses occupants, notre nation et notre continent respirent enfin. Si la joie populaire gagne le pays, le souvenir des bombardements, de la déportation et des vies dévastées, reste vif. Personne n’oublie que l’humanité a payé son plus lourd tribut. 

78 ans plus tard, il nous appartient encore et toujours de rappeler le bilan humain dramatique pour ne pas l’oublier : Entre 50 à 60 millions de morts, soit, 4 à 6 fois plus que la Première Guerre mondiale, 30 millions d’Européens déplacés, des peuples entiers décimés, près de 6 millions de juifs exterminés.

La place de Marseille dans ce conflit mondial est singulière. Sa libération le 28 août 1944, après le débarquement de Provence, fut une victoire majeure, prélude à la libération du pays tout entier.

Seul grand port de la zone non occupée, il devient, dans un premier temps, un refuge pour des milliers de réfugiés, Français ou étrangers, qui fuyaient le nazisme. L’histoire du Centre américain de secours créé par le journaliste Varian Fry et Mary Jayne Gold, a été récemment portée à l’écran. Leur action se déroulait notamment au Splendide Hotel, non loin d’ici, au 31 bvd d’Athenes. Elle a permis à quelques milliers de personnes de partir, dont de nombreux intellectuels et artistes, comme André Breton, Max Ernst, Marc Chagall, ou Hannah Arendt.

La résistance française s’organise aussi dès le début ici avec de grandes figures comme le parlementaire socialiste Félix Gouin, qui fut l’un des 80 députés à refuser de voter les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, l’implantation des réseaux de Jean Moulin et du Général de Gaulle, des communistes, du mouvement Combat, créé ici par le capitaine Henri Frenay, avec l’aide de la militante féministe marseillaise Berty Albrecht.

Le 14 juillet 1942, une grande manifestation à l’appel de la France libre rassemblait 5000 personnes sur La Canebière.

Cependant, tous bascule après le débarquement allié en Afrique du Nord, le 8 novembre 1942.

L’armée allemande décide d’occuper Marseille et de « nettoyer » ses quartiers les plus anciens et surpeuplés. La Ville de Marseille a commémoré cette année avec une grande émotion les rafles du Vieux Port, commise du 22 au 24 janvier 1943.

Accompagnés de la police nationale dirigée par René Bousquet, l’armée allemande organise une rafle de près de 6000 personnes. 1642 personnes sont déportées, dont 782 Juifs. Le quartier est vidé de ses habitants avant destruction : environ 20 000 personnes sont évacuées de leur logement.

80 ans après, de nombreux habitants ont découvert l’ampleur des victimes et des destructions.

D’autres destructions ont lieu. Les Marseillais vivent dans la peur des bombardements. Celui du 27 mai 1944 sur la gare Saint-Charles est le plus terrible avec 1200 immeubles détruits et près de 2000 morts.

Mais la résistance continue, en dépit des arrestations et des exécutions. Elle parviendra à engager l’insurrection en attendant l’arrivée des hommes du Général de Lattre de Tassigny, fin août 1944.

Souvenons nous de l’assaut de Notre Dame de la Garde mené par les 1ère et 2ème Compagnies du 7ème Régiment de Tirailleurs Algériens, appuyés par les blindés du 2ème Escadron du 2ème Cuirassiers.

Souvenons nous d’Ahmed Litim, tirailleurs algérien de 24 ans mort au pied de Notre-Dame-de-la-Garde un 25 août 1944. Une école porte aujourd’hui son nom.

Le 28 août 1944 au matin, le général Goislard de Montsabert, commandant la 3e Division d’Infanterie Algérienne annonce officiellement la Libération de Marseille.

Aujourd’hui, nous célébrons la liberté retrouvée mais nous ne devons jamais oublier les sacrifices de ceux qui ont lutté pour elle.

En commémorant ce jour historique, nous pensons, comme l’année dernière, à la guerre qui continue de ravager les frontières de l’Europe, en Ukraine ou en Arménie.

Rappelons-nous que la paix, la tolérance et la compréhension mutuelle sont les fondements de notre société. Continuons à travailler ensemble pour préserver leur héritage, ainsi que la devise de notre République : Liberté, Égalité, Fraternité. »

Sophie Camard

-> Site de la Ville de Marseille pour en savoir plus sur la rafle du Vieux Port