Discours prononcé à la cérémonie des voeux 2024 de la Mairie 1-7
Palais du Pharo, 11 janvier 2024
Merci aux jeunes qui ont participé à la cérémonie : le groupe phare du théâtre école l’Echappée belle, installée dans notre équipement du Vallon des Auffes, le groupe Copains du monde – Secours populaire français du centre-ville, et le conseil d’arrondissement des enfants.
Je suis heureuse de vous retrouver pour vous souhaiter une bonne année 2024. Quand je pense à la cérémonie de l’année dernière, le 5 janvier 2023, ici au même endroit, j’ai la sensation que c’était hier mais aussi que c’était une autre époque tellement nous avons vécu d’événements.
C’est très certainement le signe que nous vivons un changement de monde, accéléré depuis l’épidémie COVID 19. Ces moments là peuvent nous angoisser, mais ils nous invitent aussi à questionner nos modes de vie, notre rapport aux autres, les relations entre générations.
C’est pour cela que j’ai choisi le fil rouge de la jeunesse pour cette cérémonie.
Les jeunes que vous avez vus ce soir représentent un petit bout de notre ville et du creuset marseillais. Quel que soit leur quartier, leur prénom, leurs origines, ils nous transmettent l’énergie de vivre alors que nous, nous sommes parfois paralysés de peurs face aux guerres, au terrorisme, au changement climatique, à l’intelligence artificielle.
Il y a aussi des évolutions que je trouve positives, comme le rapport entre les femmes et les hommes, l’intransigeance de ne plus tolérer ni les violences faites aux femmes, ni le harcèlement, la volonté de respecter les différences… ce qui n’a jamais empêché la nécessaire règle commune… mais sans uniformiser.
Cependant, mon message n’est pas d’opposer les générations entre elles. Quand on se plaint des jeunes, regardons les adultes dans la pièce. Quand tout change, la transmission devient encore plus nécessaire. La transmission, ce n’est pas d’oublier notre Histoire, mais d’en prendre le meilleur, de transformer ce ne convient plus ou de faire ce que nous n’avons pas réussi à faire par le passé. Voilà pourquoi nous sommes de « Nouveaux anciens » (Poème de Kae Tempest présenté par le théâtre école sur scène).
Alors, vous le savez, dans ce secteur très contrasté des 1er et 7ème arrondissements, nous rencontrons des personnes très différentes : riches, pauvres, très jeunes et très âgés, nés à Marseille ou nouveaux venus de toutes régions et de tous pays. C’est sans doute notre fonction la plus intéressante de créer un relationnel humain avec différents publics, loin des échanges virtuels et de plus en plus violents des réseaux sociaux.
Dans la rétrospective que vous avez visionnée tout à l’heure, ou dans le bilan de mi-mandat que nous avons diffusé en fin d’année, vous n’avez pas retrouvé cette actualité noire qui a ponctué notre quotidien à tous en 2023. C’est normal. Nous ne sommes pas une chaîne info.
Nous rendons compte de notre action :
En effet, de l’action, il y en a, malgré certains événements que nous n’avons pas choisis. Car oui, faut-il le rappeler, nous n’avons pas choisi :
- la retraite à 64 ans,
- l’inflation et la vie chère,
- les 49 homicides du narcotrafic qui meurtrit toute la ville,
- les émeutes et leur déchaînements de violences qui ont traumatisé le centre-ville cet été,
- les horreurs quotidienne de la guerre Israël-Palestine,
- la grande pauvreté qui jette à la rue de plus en plus de personnes,
- les drames de l’exil,
- les canicules, la sécheresse, ou les tempêtes.
Ce que nous avons choisi, c’est soit d’y résister, soit de trouver des solutions à notre niveau, d’organiser des solidarités, ou plus modestement d’adoucir dès que possible le quotidien.
Cette année, signe des temps, nous avons renforcé nos actions avec la police et la justice. Nous avons même pris les services d’un avocat pour relayer des plaintes collectives ou des nuisances insupportables ressenties dans certains quartiers. Car les problèmes graves ne se règlent pas par des photos sur Facebook, ou par un seul passage de police (il en faut parfois des dizaines). Une sanction s’obtient en justice. Et la justice, c’est de l’écrit, des preuves, du temps. C’est normal dans un État de droit qui respecte la séparation des pouvoirs.
Je mesure évidemment l’ampleur des besoins et des moyens qu’il nous faudrait pour répondre à tout, mais je suis fière quand nous obtenons des résultats, comme c’est le cas de plusieurs procès contre des marchands de sommeil, suite à des signalements de la Ville (et c’est nouveau).
Je mesure la nécessité de reconstruire la confiance entre la population et les institutions. Il revient à chacun de poser une pierre à l’édifice là où il peut le faire. Donc nous le faisons. Chacun peut le faire.
En tant qu’élus municipaux, nous, ce que nous avons choisi, c’est de :
- reconstruire des écoles et des équipements sportifs,
- produire des logements accessibles à tous, en harmonie avec la nature en ville,
- protéger et mieux servir les habitants, avec énormément de rattrapage à faire dans les services municipaux : les écoles, les crèches, la police municipale
- réhabiliter la culture comme un bien de première nécessité, et pas un privilège réservé à quelques uns.
Alors nous avançons.
L’année dernière, je vous avais parlé du parcours du combattant de l’action publique. Cette année, je voudrais vous citer des chantiers qui vont démarrer ou qui seront livrés en 2024 :
- Oui nous allons inaugurer la nouvelle École des Abeilles,
- Oui le nouveau centre sportif à Belsunce, dans l’ancien couvent Korsec, va bien arriver. Il sera géré par la mairie de secteur.
- Les travaux au théâtre Silvain vont démarrer pour mieux accueillir les artistes, la logistique et mieux loger le gardien (le théâtre Silvain sera donc en congés cet été),
- Nous continuerons de requalifier et renaturer des jardins : celui de Manouchian à côté d’ici, le jardin de Saint-Victor Corderie, les abords du Conservatoire avec je l’espère, bientôt, un plan de travaux pour le Palais Carli
- Les travaux sur le bâtiment Coco Velten à Belsunce, vont s’engager, avec Marseille Habitat : la Ville y a fait le choix de renforcer la partie logements, tout en conservant la cantine solidaire et des surfaces pour des bureaux associatifs ou professionnels.
- Et oui nous allons implanter un lieu ressource évolutif sur le site de l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne, avec un jury qui associe les familles des victimes.
Ce sujet, vous savez qu’il me tient à coeur. Je salue dans la salle les équipes de la Société Publique Locale d’Aménagement d’Intérêt National dédiée à la lutte contre l’habitat indigne, avec lesquelles je vais inaugurer d’ici quelques jours les premiers chantiers de réhabilitation d’immeubles dégradés, en haut de la rue Jean-Roques à Noailles. D’autres immeubles suivront, ainsi que des propositions sur les espaces publics. D’ici quelques jours aussi, l’appel à manifestation d’intérêt pour attribuer les immeubles de l’ancien périmètre de sécurité du haut de la rue d’Aubagne (du 71 au 83) à un ou deux bailleurs sociaux, va être publié.
C’était une promesse forte de notre part de ne pas détruire ce quartier mais de le réhabiliter comme un centre ancien, et de remplacer les logements indignes par de vrais logements sociaux.
Je remercie les élus qui nous accompagnent sur ce chemin, comme David Ytier, le Président de la SPLA-IN qui représente la Métropole, qui n’est pas de ma couleur politique, et Patrick Amico, Adjoint au Logement au Maire de Marseille.
Je vous assure aussi de notre détermination à mieux encadrer les locations touristiques saisonnières. La crise de l‘habitat indigne a déjà provoqué des milliers de départs d’habitants dans des conditions forcées de relogement. Bien sûr que les touristes et les visiteurs sont bienvenus, mais nous avons la responsabilité que leur accueil ne s’oppose pas au droit au logement des habitants de Marseille.
Dans notre souci d’adoucir la ville, nous verrons cette année le démarrage de notre régie de quartier. Je vous donne rendez-vous en ce mois de février pour inaugurer son local et ses premières activités.
Beaucoup d’autres sujets vous intéressent, concernant la voirie, les transports, les pistes cyclables, les places publiques, la propreté mais vous avez compris qu’il relèvent d’un travail en commun avec la Métropole. Ils font l’objet d’un feuilleton politique que je ne trouve pas drôle du tout mais dont les rebondissements régalent les médias.
C’est frustrant mais en démocratie, il faut aussi expliquer aux électeurs ce qui fait accord ou désaccord entre des sensibilités politiques différentes, afin qu’il puissent faire leurs choix en toute connaissance de cause.
La démocratie, tout le monde en parle, tout le monde veut la sauver !
A Marseille nous avons ce statut particulier d’une élection du conseil municipal par addition d’élections par secteur, comme à Paris et à Lyon. C’est une vieille loi de 1982. Vous entendrez sans doute parler d’un projet de réforme du mode de scrutin pour permettre, à côté des secteurs, l’élection directe du conseil municipal. Nous y sommes favorables mais les modalités pratiques ne sont pas encore connues.
Et surtout, il est temps de moderniser les compétences des mairies de secteur si elles continuent d’exister et d’être élues au suffrage universel direct.
Si je m’en tenais à la loi, je serais mal vue des habitants qui viennent à nous pour des questions de tout ordre, bien au-delà de notre compétence légale. Nous avons fait le choix volontariste d’être actifs, présents sur tous les sujets, en relayant auprès des autorités compétentes toutes sortes d’interpellations. C’est un choix, pas une obligation.
J’ai acquis la conviction que ce choix est utile, mais pas suffisant dans l’efficacité, à cause de la dispersion des niveaux de décisions. J’appelle donc de mes vœux une modernisation des mairies de secteur mais bien plus globalement, le souffle d’une nouvelle décentralisation en France, moins complexe, moins inégalitaire, et plus lisible pour nos concitoyens.
Voilà, j’ai fait le tour de trop de sujets.
En 2024, je ne peux pas vous parler à l’avance des mauvais tours de l’actualité mais je sais qu’il est prévu de vivre de beaux moments de rencontres, comme l’arrivée de la flamme olympique, les olympiades culturelles, les compétitions sportives.
Ces événements ne sont pas là pour nous distraire de la tâche, mais pour donner confiance et fierté dans notre ville. Bonne année 2024 !
Sophie CAMARD