Le 27 décembre 2019, la cour administrative d’appel a annulé définitivement la délibération du conseil municipal du 16 octobre 2017 décidant d’un recours au partenariat public/privé pour la destruction de 31 écoles/reconstruction de 34 écoles. Le coût de financement de cette opération était complètement farfelu : 1 Milliard € incluant des frais financiers, d’entretien et maintenance inexpliqués.

C’est une belle victoire du collectif contre ce PPP dont je me permets ici de citer le communiqué : « L’état des écoles publiques marseillaises est désastreux, la municipalité Gaudin en porte la responsabilité. Le recours au PPP n’avait que pour but de permettre aux majors du bâtiment et travaux publics de faire des profits considérables au détriment de l’intérêt général. Un groupe de citoyens avait saisi le tribunal administratif dès le 13 décembre 2017, les architectes l’avaient fait aussi. Le tribunal administratif a annulé le PPP, mais la Ville a relevé appel du jugement. La Cour rejette cet appel en constatant le caractère fantaisiste de l’évaluation des risques qui seraient moindres en PPP qu’en maîtrise d’ouvrage publique. Le collectif regroupant syndicats, architectes, petites et moyennes entreprises, parents d’élèves, militants associatifs et politiques s’est mobilisé contre le PPP et a montré que l’union de toutes les forces soucieuses de l’intérêt général pouvait être victorieuse. La rénovation des écoles est indispensable, elle doit être prioritaire dans le respect du service public et du seul intérêt des enfants. »

Dans son rapport sur la situation financière de la Ville, la Chambre régionale des comptes avait repris une partie des critiques contre ce montage financier inique, dans un chapitre spécifique consacré à la dégradation du bâti des écoles. En voici un résumé :

Chiffre clés des écoles :

  • 77 201 élèves en 2018 (+1 208 en deux ans)
  • 444 écoles dont la moitié en REP
  • Nb d’élèves > 25 dans 35% des écoles maternelles et primaires
  • La moitié des écoles primaires et élémentaires n’ont pas d’équipement EPS

L’Éducation nationale a signalé un mauvais état du bâti dans au moins 54 écoles, situées dans le 3ème, 13ème, 14ème et 15ème arrondissements. L’école du boulevard National (3ème) est citée comme un exemple du pire.

Les dégradations les courantes sont les suivantes :

  • toilettes non utilisables (13 écoles) ;
  • amiante (45 écoles) ;
  • présence de nuisibles (48 écoles) ;
  • chauffage défectueux (67 écoles) ;
  • fuites et infiltrations suite aux intempéries de novembre 2018 (52 écoles).

Ces alertes ne sont pas suivies d’effet et la réponse de la Ville à la Chambre laisse sans voix (extrait p. 68) :

Les dépenses d’entretien des écoles examinées par la Chambre sont pitoyables : 4 M€ seulement par an, soit 9300 € / an et par école. Dans 99% des cas, il s’agit de dépenses inférieures à 5000 €, ce qui relève de petites interventions d’urgence « menées en dehors de toute idée d’entretien planifié » (p. 69).

En ce qui concerne les opérations plus lourdes de construction et rénovation, on apprend que moins de la moitié de l’enveloppe de crédits ouverts sur la période sur la période 2012-2017 a été consommée (voir l’extrait ci-dessous p. 71) :

Et quand un nouveau groupe scolaire est construit, comme à la Busserine (14ème) suite aux travaux de la L2, les travaux sont défectueux. Les sanitaires étaient mal raccordés au tout à l’égout et le vide sanitaire sous l’école s’est rempli d’eaux usées à l’occasion d’une rupture de canalisation d’assainissement.

Un plan d’urgence de 700 M€ pour les écoles, c’est possible

Ce résumé suffit sans doute à comprendre la colère et l’incompréhension des parents d’élèves, enseignants ou simples citoyens des quartiers Nord et de la Belle de mai, ces quartiers les plus pauvres de Marseille. Je sais aussi que des écoles dans d’autres quartiers réputés plus aisés ne sont pas mieux loties (préfabriqués, problèmes de chauffage, d’isolation…). Il va de soi que cette situation des écoles agrège les effets d’une politique de ségrégation sociale… et l’incapacité générale de la municipalité à planifier correctement l’entretien.

On peut estimer le coût d’une trentaine d’écoles à construire à hauteur de 500 M€. En y ajoutant les enveloppes nécessaires à des rénovations lourdes, on peut monter à 700 M€. Le budget d’investissement de la Ville est aujourd’hui de 150 à 200 M€ par an, soit plus d’1 Milliard € sur 6 ans. Une part très faible est consacrées aux écoles, comme on vient de le dire. Il est donc tout à fait réaliste de prévoir un plan d’urgence des écoles à 700 M€ qui puisse être réalisé en grande partie sur le prochain mandat. Reste à élire une majorité qui fera des écoles publiques sa priorité absolue !